« Come on ! Keep to the beat ! »
Ce qui est étrange, c'est de voir à quel point les gens peuvent changer lorsqu'ils perdent leur cœur, et à quel point de petits souhaits peuvent déplacer des montagnes.
C'est un peu le cas de Demyx qui, il faut l'avouer, a toujours fait un peu tâche depuis qu'il est membre de l'organisation XIII. Il n'y a qu'à regarder ceux qui l'entourent pour se dire qu'il est l'intrus : Xemnas ? Un exemple de calme glacial à la puissance dévastatrice. Zexion ? Sûrement le plus jeune mais aussi le plus zélé. Marluxia ? Je vous l'accorde, il aime comploter, mais avouons qu'il impose le respect. Ces trois exemples suffisent à se demander comment Demyx a pu en arriver là.
Son caractère frivole et sa paresse en font clairement le plus mauvais élément de l'ordre, et pourtant... S'il voulait bien faire un effort, il les réussirait ses missions ! Lorsqu'il s'agit de glaner des informations, il traîne les pieds mais c'est certainement moins catastrophique que lorsqu'on lui demande de se battre.
Mais avant de vous conter les aventures épiques de Demyx, il convient de parler un peu de son existence passée, lorsqu'il s'appelait encore Medy et vivait à Atlantica. Point de jambes, il avait alors la moitié du corps d'une méduse bleutée, son buste, ses bras et sa tête étant à peu de choses près ceux qu'on lui connaît aujourd'hui. A peu de choses près car si l'on croisait Demyx avec les branchies qu'il possédait à l'époque, on se poserait sûrement des questions quant à leur utilité réelle.
Cela en étonnera plus d'un, mais c'était à l'époque un jeune homme gentil, toujours prêt à aider son prochain et d'une naïveté impressionnante. Il aurait été près à croire à l'existence du grand Kraken sans la moindre hésitation, par exemple. Ainsi, les opportuniste voyaient toujours en lui la personne sympathique à qui l'on pouvait demander les pires choses : On pouvait être sûr qu'il se plierait en quatre pour le faire. Ce n'était pourtant pas faute d'avoir été prévenu, et c'est avec désolation que ses quelques amis le voyait nager aux quatre coins d'Atlantica pour satisfaire les caprices d'autrui. Mais c'était plus fort que lui, il aimait rendre service et par dessus tout, il aimait ce regard plein de gratitude qu'on lui lançait.
Malgré tout ça, il manquait quelque chose d'essentiel à Medy. Les profondeurs sous marines ne le satisfaisaient plus, et les merveilleuses histoires qu'on lui avait raconté sur les autres mondes ne cessaient de le faire rêver. On avait beau lui dire que ce n'était que des sornettes, pour le coup il avait raison d'y croire. Car dans ces mondes là, on pouvait marcher sur terre, courir, et surtout jouer de la musique. Medy n'avait jamais entendu une note de sa vie, mais ça ne l'empêchait pas de trouver cela fascinant. Mais allez faire sonner les cordes d'une guitare ou d'un violon sous l'eau ? Vous trouverez tout de suite cela bien moins mélodieux. Quant à chanter... Disons que les chants d'une baleine sont vite lassant.
Alors Medy se laissait partir dans ses rêves, il tentait des constructions de coquillages impressionnantes dans l'espoir d'en faire un instrument de musique sous marine révolutionnaire mais rien à faire : C'était toujours un échec. Toute cette eau l'étouffait, jusqu'au jour où, planté au milieu d'une fosse sous marine jonchée des restes de ses œuvres d'art ratées, il s'était mis à hurler à plein poumons que si quelqu'un pouvait lui offrir son billet de sortie et un talent musical quelconque, il était prêt à faire n'importe quoi. A tout donner. Grosse erreur de sa part. Car voyez-vous, c'est toujours dans les moments désespérés qu'une personne mal intentionnées vient vous susurrer de mauvaises choses à l'oreille. Profiter d'une personne naïve et crédule, c'est plus simple et moins fatiguant qu'avec quelqu'un de méfiant. C'est donc ce moment que choisis Ursula la sorcière pour se montrer. Medy n'en avait que trop entendu parler pour ne pas se méfier, mais elle se montra si gentille et prévenante qu'il tomba dans le piège la tête la première.
« Je peux t'aider! » Lui dit-elle.
« Tous ces gens qui se disent tes amis te mentent depuis le début. D'autres mondes existent, et ils n'attendent que toi. Je peux t'offrir ce que tu veux, et je n'attend rien d'autre en retour que ton accord. » Son accord pour quoi ? Medy haussa les épaules, se disant que rien ne pouvait être pire que sa situation actuelle. Il consentit alors à signer un contrat avec Ursula, en omettant de lire les petites lignes tout en bas, celles qui stipulaient qu'en échange d'une paire de jambes et d'un voyage loin d'Atlantica, il perdait son cœur. Pour l'heure, c'était le cadet de ses soucis et pourtant, il venait de faire la plus grosse erreur de sa vie.
Par pur caprice et envie d'ailleurs, il venait de vendre son humanité à une sorcière. Laquelle ne tarda pas à lui faire amèrement regretter son geste. Imaginez un instant que l'on essaye de vous arracher les entrailles avec une petite cuillère chauffée à blanc, et multipliez cette douleur par dix. Vous serez pourtant encore loin d'imaginer à quel point perdre son cœur peut-être douloureux. Et cette douleur, Demyx ne l'a toujours pas oubliée. Elle le fait frissonner de dégoût chaque fois qu'il y repense.
Après cette épouvantable expérience, il perdit connaissance et ne se réveilla que plusieurs heures plus tard, échoué sur une place. Les vagues qui venaient se jeter sur le sable finirent par le réveiller, et il peina alors à comprendre où il était. Le sable lui brûlait les yeux et la gorge, cet oxygène qui emplissait ses poumons n'avait rien à voir avec celui d'Atlantica, et il était complètement perdu. Et il avait l'air fin, avec des algues pour unique vêtement. Mais il avait des jambes et découvrait une nouvelle conception de la gravité, maintenant qu'il ne vivait plus sous l'eau. Il n'y avait rien autour de lui à part des algues et un vieux chandail usé et trempé, qui allait pourtant lui être bien utile.
Pourtant il n'arrivait pas être satisfait. Tout simplement parce qu'il ignorait pourquoi et comment il s'était retrouvé ici, tout comme il se demandait qui il était et quel était son passé. La seule chose qui lui revenait en tête, c'était son prénom et l'impression de se noyer. Pour le reste... Le néant total. Difficile d'être heureux d'un changement lorsque l'on ignore tout de son point de départ. Perdu sur cette plage grise et glacée, le corps grelottant sous la brise, il fini par se lever et erra ainsi, s'enveloppant comme il pouvait dans le chandail qu'il avait trouvé près de lui. Il regagna la ville qui bordait la plage, où il fut presque étonné de voir les gens se précipiter pour l'aider. Qu'est ce que c'était que ce monde où les gens s'entraidaient ? Malgré l'étonnement, il ne se fit par prier pour entrer dans la première maison qu'on lui présentait afin de se réchauffer.
Maintenant qu'il n'avait plus de cœur, la bonté lui était étrangère et semblait sonner faux pour lui. On lui demanda d'où il venait, il se contenta de secouer la tête. Il n'en avait aucune idée et n'était pas vraiment disposé à parler. Il resta plusieurs jours muré dans le même mutisme à observer les gens autour de lui. Il ne comprenait rien à cette gentillesse qui les liait, il la voyait mais n'arrivait pas à la toucher et, pire que tout, cela lui était bien égal.
Lorsqu'il fut rétablit, il s'installa dans une petite maisonnette à l'entrée de la ville, gagnant sa vie en fabricant des instruments de musique et en surveillant les rues désertes à la nuit tombée. Le jeune homme n'ayant aucun souvenirs de sa vie passée, il ignorait d'où lui venait ce talent pour faire de n'importe quel objet un instrument mélodieux. Pourtant, il était bien stipulé dans son contrat avec Ursula qu'en échange de son cœur elle offrait un grand talent pour la musique. Mais à vrai dire, quelle importance ça avait ? Pourquoi se demander d'où ça venait tant que ça marchait ? D'ailleurs, il semblait avoir troqué sa gentillesse passée pour une espièglerie exacerbée. Il ne manquait pas de faire des farces à ceux qu'il croisait la nuit quand il s'ennuyait. Après tout, parcourir les rues d'une ville déserte avait quelque chose de profondément blasant.
Jusqu'au jour où tout bascula dans sa petite vie tranquille de simili qui ignore tout de sa véritable nature. Il devait être deux ou trois heures du matin, et Demyx était affalé sur un banc, un paquet de bonbons dans les mains. Il soupirait, comme d'habitude, n'ayant pas la moindre envie de travailler. Il aurait de loin préféré dormir, à cette heure. Lorsque son chef vont lui demander, ou plutôt lui aboyer, de se remettre au travail, il le fit en traînant les pieds. Au détour d'une rue, une forme sombre attira son attention et il s'en approcha avec précaution. Et si c'était un voleur ? Il ne savait pas se battre, tout ce qu'il avait pour lui c'était deux jambes lui permettant de s'enfuir en cas de besoin. Pas très héroïque, à vrai dire.
« Hè ! Qu'est ce que vous faites là à cette heure, mon vieux ? Faut rentrer ! »Mais la chose tourna bientôt ces deux grands yeux blancs et vides vers lui, et Demyx fit un bond en arrière.
« La vache ! C'est quoi ça ? »C'était une créature qu'il n'avait encore jamais vu, une sorte de petit lutin noir aux grands yeux et aux gestes saccadés comme ceux d'une marionnette. Et il n'avait pas l'air très amical. Demyx fit volte face, s'apprêtant à faire demi tour pour sonner l'alerte, mais il se retrouva alors encerclé par une dizaine de créatures noires qui le regardaient avec insistance. Plus moyen de fuir. Dans un mouvement parfaitement synchronisé, les créatures se jetèrent sur lui, et il n'eut d'autre choix que de se recroqueviller sur lui même, les bras au dessus de la tête pour tenter de se protéger.
Il poussa un hurlement, s'attendant à finir dévorer par ces petites bestioles, mais il ne se passa rien. Au bout d'un temps qui lui parut incroyablement long, Demyx consentit à ouvrir les yeux et se redressa en tremblant. Il n'y avait aucune trace de la horde noire, mais la rue était inondée et il avait les pieds dans l'eau. C'était à n'y rien comprendre... Faisant un tour sur lui même, il sursauta à nouveau en se retrouvant face à face avec... Lui même. Ou du moins c'était une parfaite réplique de sa personne sous forme aqueuse.
« C'est quoi encore ce délire... ? T'es qui, toi ? »La chose se contenta de l'observer mais ne répondit rien. Lorsque Demyx chercha à le faire réagir en lui enfonçant un doigt dans l'oeil, avec délicatesse et finesse, la forme éclata, l'éclaboussant au passage.
« C'est malin ! J'suis trempé maintenant ! » Grommela-t-il, mouillé de la tête aux pieds.
Il avait eut sa dose d'émotions pour la soirée, et préféra rentrer que de tomber à nouveau sur son clone ou l'une de ces créatures noires. Ses chaussures faisaient « ploc ploc » sur le sol et il avait la désagréable impression que ses cheveux ressemblaient à une vieille serpillière humide.
Une fois chez lui, il attrapa une serviette pour sécher sa tignasse et s'apprêtait à changer de vêtements lorsque, se tournant vers la salle de bain, il constata qu'il n'était pas seul. Faisant un bond en arrière, il jeta la seule chose qu'il avait à sa portée sur l'intrus, à savoir sa serviette de bain trempée.
« Mais c'est fini de me faire peur, oui ? Vous vous êtes donné le mot ? Une minute... Vous êtes qui ? Qu'est ce que vous faites chez moi ? »Mais personne ne lui répondit. Etant donné sa carrure, ce devait être un homme, et il aurait sûrement pu mettre Demyx à terre d'une simple claque. Il portait un long manteau noir et une capuche sur la tête, rendant impossible son identification. Lorsqu'il s'approcha du jeune homme, celui-ci eut la même réaction défensive que dans la rue, un peu plus tôt. Surgit de nulle part, une impressionnante quantité d'eau se dressant face à lui pour former un bouclier... Que l'intrus traversa sans la moindre gêne. Sans savoir comment il faisait, Demyx tenta maladroitement de projeter cette eau sur l'homme en noir, mais celui-ci écarta chacune de ses attaques avec une aisance qui fini par vexer le jeune homme.
« Mais qu'est ce que vous me voulez, à la fin ? » Hurla-t-il tandis que l'autre l'attrapait par le col et faisait apparaître un portail devant lui.
« Lâchez-moi ! »L'homme ne répondit rien et jeta Demyx à travers le portail. Ce dernier, reprenant ses esprits, constata qu'il n'était absolument plus chez lui mais... Ailleurs. Un ailleurs étrange, aux murs gris et au sol d'un blanc aveuglant. La décoration laissait à désirer, c'est ce que retint Demyx ce jour là.
L'homme qui l'avait emmené daigna enfin lui expliquer ce qu'il faisait là, à commencer par lui qui et ce qu'il était réellement. Si les choses parurent absurde au jeune homme au premier abord, il devait reconnaître que cela expliquait bien des choses. Il était un simili, avait une certaine influence sur l'eau et surtout, il n'avait pas de cœur. Cette dernière révélation lui expliquait enfin pourquoi il ressentait continuellement un grand vide en lui. En revanche, on ne lui expliqua rien de son passé, comment sa forte personnalité lui avait permis d'être un simili si humain et non pas une chose étrange comme il n'allait pas tarder à en croiser des centaines.
On ne lui laissa pas vraiment le choix quant à la suite des événements. Il rejoint l'Organisation XIII malgré lui, car dès qu'on lui parla de travailler, il songea à s'enfuir à toutes jambes. Mas pour aller où ? Il ne savait même pas où il était.
On lui donna juste un nom, un numéro, et le même uniforme sinistre que les autres. Bientôt, il apprit à maîtriser ses étranges pouvoirs d'eau grâce à la musique, et ce devait être la seule chose amusante qu'il avait à retenir. Il ne tarda pas à se faire la réputation du cancre de la bande, ainsi que de celui que tout le monde veut éviter pour ne pas se retrouver avec un pot de peinture sur la tête ou pire encore. Depuis, Demyx enchaîne les échecs et les missions à moitié remplies, tout simplement parce qu'il est trop paresseux pour faire mieux. Ce qui ne l'empêche pas de relativement bien s'entendre avec quelques membres... Tandis qu'il aimerais bien tordre le cou à d'autres.